lundi 18 février 2013

Incurable

Je suis majeuse, vaccinée, je remonte mes chaussettes et je dis bonjour à la dame. Je suis capable de déménager toute seule comme une grande et d'aller m'installer dans une ville inconnue, d'y rester quelques années puis de reprendre mes clics et mes clacs et aller m'installer ailleurs, dans une ville que je ne connais pas plus, où j'ai comme une grande fifille trouvé un job, un appartement et des meubles à mettre dedans. Je colle mes timbres bien droits et je ne dois rien à mon banquier. Je sais faire une lessive de pulls en laine sans me retrouver avec une cargaison propre taille 8 ans après une heure et demie en tambour. Je sais fabriquer des pâtes fraîches et des étagères en bois avec mes blanches mimines, et même utiliser une perceuse, peindre des murs et recharger une batterie de voiture : McGuyver, à côté de moi, c'est une tapette.

Mais il suffit qu'un beau jeune homme s'intéresse à mon cas, même amicalement, en me faisant un sourire au passage et hop, j'ai huit ans et demi, je deviens rouge comme une pivoine, je fais des phrases qui n'excèdent pas sujet-verbe-complément (et encore, pas toujours dans l'ordre) ou bien je me mets en mode "on est des potes, raconte moi ta vie" et après ça, j'ai envie de me taper la tête contre les murs quand l'homme en face commence à me raconter qu'il vient de rencontrer une super nana avec force détails. Voire mon esprit, dans un sursaut d'aventure, se dit "j'va lui dire-euh" et je tombe à plat comme un soufflet à la sortie du four parce que l'autre en face, y m'a pas vue venir et il me dit "je préfère qu'on reste amis" et j'hésite entre des pulsions meurtrières et suicidaires. Quand enfin j'ai fini de me ramasser à coup de petite cuillère, et que je vais mieux, je relève la tête et je tombe sur un autre sourire ravageur : c'est reparti mon kiki, un tour de manège gratos pour la p'tite dame.

Étonnement, dans d'autres situations, je garde le cap, je n'ai même pas besoin de respirer un grand coup pour avoir l'air stoïque, et je voltige de quatre heures en happy hour en trouvant ça normal, dissociation complète des envies de mon corps et de mon coeur, comme si j'avais réussi à créer un barrage mental en me disant, là, si tu tombes, ma cocotte, tu es cuite en croûte de sel. Et je continue à avancer en funambule, le sourire aux lèvres. Je fais des phrases compliquées et je rêvasse, mais je reste bizarrement très lucide. Peut-être parce que justement, je sais que c'est bien, c'est chouette, c'est doux, c'est smurf, mais il n'y a pas d'essai à transformer, pas d'enjeu. 

Quand mes sens se mettent en tête qu'il y a un enjeu, je me prends les pieds dans la corde raide, et je m'étrangle un peu toute seule au passage. Si jamais vous voyez un preux chevalier qui s'ennuie faute de dragon à aller occire, vous serez gentils de lui indiquer ma direction avant que je ne vire au bleu. Un grand brun si possible. Merci beaucoup. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Parlez moi d'amour...